Mettre le queer dans les services de santé sexuelle à Toronto

 

Par Mike Smith - Navigateur des systèmes de santé des hommes gais, ACT 

De juin 2018 à novembre 2018, 45 personnes présentes lors des consultations communautaires ont décrit les obstacles aux soins de santé ayant une incidence sur leur capacité d'accéder aux services à Toronto. Si certains ont une perception positive des services de santé, mais la majorité d'entre eux ont eu des expériences négatives et considèrent que certains éléments propres aux services de santé sont problématiques, tout particulièrement les services de santé sexuelle. Comme le taux d’infections transmissibles sexuellement et par le sang (ITSS) continue d'augmenter chez les hommes gais, bisexuels et queer (GBQ) cis et trans[1], il est urgent d'adapter les services de santé sexuelle de Toronto aux besoins de la population.

Au cours de nos entretiens, les informateurs ont indiqué avoir éprouvé de la difficulté et de la détresse en accédant aux services de santé sexuelle. Les efforts pour accéder àdes soins adéquats entraînent souvent des expériences d'anxiété, de honte et de malaise. Les informateurs ont exprimé le besoin perçu de créer des espaces queer désignés et des services spécialisés afin de tenir compte de la culture, des expériences et des besoins uniques en matière de soins de santé des populations GBQ. Selon Lévesque, «les services de santé devraient répondre aux caractéristiques de la population afin de garantir leur capacité de les utiliser lorsqu'ils en ressentent le besoin.»[2] Cela suggère que les systèmes et les services de soins de santé devraient être adaptés afin d’adresser les obstacles spécifiques rencontrés par diverses populations; et que les services conçus pour desservir les membres de la population en général peuvent être intrinsèquement moins efficaces quand vient le temps de répondre aux besoins des hommes gais, bisexuels et queer cis et trans.

Les six «C» de l’accès amélioréaux soins de santé

Les informateurs ont formulé de nombreuses suggestions concernant la façon d’améliorer l’accès aux services. Ces priorités peuvent être résumées par le biais des six «C» pour un meilleur accès aux soins de santé. Cette approche décrit les besoins perçus des informateurs en termes d’amélioration des expériences lors de l’accès aux services de santé (voir la figure 1) :

Commodité–Faciliter l'accès aux services

Augmenter les heures de service, offrir des services de soir et de fin de semaine et ouvrir de nouveaux espaces à l'extérieur du centre-ville. Réduire le temps d'attente en utilisant des formulaires auto-administrés d’admission et d'évaluation des risques. Fournir plus de services sans rendez-vous que de services exclusivement sur rendez-vous. Autoriser les utilisateurs du service à attendre dans des espaces autres que des salles d'attente encombrées si les temps d'attente longs persistent.

Confort –Rendre les services plus agréables d'accès

Équilibrer les opérations avec un service à la clientèle exceptionnel afin de réduire les sentiments d'anxiété, de peur et de honte des utilisateurs. Utiliser des stratégies de communication centrées sur le patient et axées sur la compassion et l’empathie. Créer une atmosphère chaleureuse et accueillante avec des images calmantes, des espaces ouverts, un éclairage naturel et des sons apaisants. Éliminer les approches d'éducation et de conseil en matière de santé qui favorisent les sentiments de honte.

Connexion culturelle –Rendre les services plus pertinents

Concevoir des services correspondant aux valeurs des divers utilisateurs du service. Concevoir des services qui adressent la détresse empêchant les gens d’accéder aux services. Veiller à ce que les images et le personnel reflètent cette diversité. Invoquer un sentiment d’appartenance et de sécuritédans les espaces cliniques pour les populations mal desservies, telles que les personnes racisées et non conformistes de genre. Démontrer une très bonne connaissance (ou démontrer une intention d'apprendre) pour augmenter les perceptions de l'adéquation du service. Préparer le personnel à communiquer en utilisant un langage inclusif des réalités trans.

Choix –Voir à ce que les services favorisent l’empowerment

Permettre aux clients’avoir un plus grand pouvoir d’autodétermination lors de l’accès aux services. Offrir plusieurs types de tests, de méthodes de conseil et d’éducation, de services de soutien, de plans de traitement, etc. Augmenter la flexibilité lors de la détermination de l'admissibilité aux services afin de tenir compte du fait que certains utilisateurs de services pourraient ne pas se sentir à l'aise de signaler certains comportements lors du dépistage ou de l'évaluation des risques.

Confidentialité –Rendre les services plus privés

Tout faire en sorte afin de créer des services discrets et privés. Fournir des services anonymes lorsque cela est possible et protéger les identités des utilisateurs de services dans un contexte de services non anonymes. Concevoir des espaces cliniques pour répondre aux préoccupations des utilisateurs de services en matière de confidentialité; par exemple, envisager de disposer de plusieurs salles d'attente ou d'espaces privés pour les réunions.

Communication –Rendre les services plus connus

Concevoir du matériel promotionnel qui engage des sous-populations spécifiques. Créer des campagnes éducationnelles multimédias pour la santé destinées aux populations mal desservies, notamment aux personnes qui utilisent des substances, aux travailleuses et travailleurs du sexe et aux personnes bispirituelles. Mesurer la portée de ces campagnes afin d’identifier les points forts et les points à améliorer des stratégies de communication. Fournir des informations détaillées sur les protocoles de test et de traitement, les processus cliniques, la manière dont les informations personnelles seront stockées, etc.

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Pour une description plus détaillée de ces constats, veuillez consulter la publication Sexe, stigmatisation et systèmes de santé: série de consultations communautaires - Rapport final (2019), bientôt disponible sur www.actoronto.org.

Les agences de services de santéde Toronto (et les agences àtravers le Canada) sont encouragées àmettre en œuvre ces résultats et àdécouvrir de nouvelles opportunités afin d’améliorer l'accès aux soins de santépour les utilisateurs de services existants et potentiels.

[1]Toronto Public Health (2017). Sexually Transmitted and Bloodborne Infections. Communicable Diseases in Toronto.

[2]Levesque, J., Harris, M., Russel G. (2013). Patient-centred access to health care: conceptualizing access at the interface 
of health systems and populations. International Journal for Equity in Health, 12(18).